Depuis sa publication en 1999 dans sa version originale française, Stupeur et tremblements a suscitéde nombreuses réactions en ce qui a trait à la vision du Japon et des Japonais. Le plus intrigant estque la teneur de ces commentaires a tout de même considérablement varié entre les aires linguistiques :les francophones y ont vu surtout un document à portée ethnographique crédible sur la culture nipponealors que les anglo-saxons ont eu tendance à remettre en cause la véracité de certains faits rapportéspar Nothomb sans compter que les Japonais eux-mêmes, sans doute orientés dans leur lecture par lapréface de l’auteure à la traduction japonaise qui souligne que ce récit n’est que le compte rendu desa vision du travail dans une multinationale sans lien avec sa vision du Japon, y ont principalementvu l’expression d’un regard particulier sur le monde du travail.Entre la vision orientaliste (au sens de Saïd) qui prédomine chez les francophones, la vision critiquedes anglo-saxons et la vision anecdotique des Japonais, se dessine sans doute des différences deperception du Japon (et au-delà, du regard sur soi porté par les étrangers) propres à chacune de cesaires linguistiques. Outre des facteurs intrinsèques à l’œuvre qui ont pu jouer un rôle déterminant, enparticulier les diverses réflexions sur les coutumes japonaises, l’ethos développé par Nothomb a puavoir une influence considérable, en particulier chez les francophones. Il faudra déterminer selonquelles modalités l’interaction entre le texte, le péritexte et l’épitexte de Stupeur et tremblements peutexpliquer les différences de perception que cette œuvre a pu suscitées, en mettant en particulierl’accent sur la représentation du moi mise en scène par l’auteure.